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Numéro 1

Postface: Beaucoup de pain sur la planche!

Serge Mongeau

Notre monde est dominé par la recherche de la richesse. Et celles et ceux qui trouvent les moyens de s’enrichir ne se satisfont jamais de ce qu’ils ont : ils cherchent constamment de nouveaux moyens d’accumuler toujours davantage ; ils veulent une croissance constante de leurs profits. Le domaine de l’alimentation n’a pas échappé à cette logique. Cette activité essentielle de tout être vivant s’est transformée, au fil des ans, en multiples sources d’enrichissement pour des multinationales qui ont mondialisé la production, la transformation et la consommation des aliments en devenant des empires toujours plus puissants qui imposent leurs volontés à des gouvernements complaisants.

 

Il est urgent que nous remettions en cause ce modèle alimentaire. L’alimentation est à la base de notre existence ; en ne cherchant qu’à multiplier les façons d’en tirer plus de profit, nous sommes en voie de la détourner de sa fonction essentielle : donner à toutes et à tous les moyens d’entretenir nos organismes avec des aliments sains, agréables à consommer.

 

Aux yeux des objecteurs de croissance, le lien entre cette recherche incessante d’un profit toujours plus important et les dérives de l’alimentation est très clair. Aussi faut-il prendre conscience de toutes ces pratiques qui ont actuellement cours :

 

  • l’intégration verticale et la création de monopoles toujours plus puissants qui donnent la possibilité de tuer le commerce local et de s’emparer des fermes familiales ;
  • l’industrialisation de la production alimentaire qui a de plus en plus recours au pétrole et qui détruit l’humus à la base de la production ;
  • la mondialisation de la production qui amène la fin de la culture vivrière et la ruine des paysans dans beaucoup de pays ;
  • l’augmentation du transport des aliments, avec une contribution croissante à la production de gaz à effets de serre ;
  • l’accaparement progressif des terres par un petit nombre de propriétaires.

 

En fait, il faut d’urgence repenser toute notre alimentation. Trouver les moyens de rendre les fermes familiales viables, en assurant aux fermiers un revenu et des conditions de vie convenable. Encourager la production locale par l’agriculture urbaine, par les circuits courts production-consommation (agriculture soutenue par la communauté, marchés urbains…). Trouver les moyens de redonner vie à nos sols. Mettre fin aux subventions qui incitent à la surproduction et amènent à des exportations qui débalancent les agricultures locales, tout en contribuant au dérèglement climatique.

 

Il y a aussi toute l’industrie de la transformation qu’il faut revoir ; car ce sont de plus en plus des calories vides que nous consommons, des aliments préparés grâce à des processus physiques extrêmes qui en enlèvent des micro-nutriments essentiels alors que par ailleurs on y ajoute une foule de produits chimiques aux effets incontrôlés. Il n’y a donc pas à s’étonner que nous nous retrouvions avec une augmentation rapide des diverses maladies de civilisation que sont le diabète, l’obésité, les maladies cardiaques et toutes ces diverses pathologies mal identifiées que sont les maladies auto-immunes.

 

Ce numéro de L’échappée belle explore divers aspects de cet aspect essentiel de nos vies que constitue notre alimentation. Souhaitons que ces diverses réflexions provoqueront les remises en question qui s’imposent et surtout qu’elles encourageront des actions conséquentes. L’alimentation, comme tous les autres aspects de nos vies, a été transformée par la croyance que « plus est mieux ». Il faut sortir de cette orientation qui valorise une croissance infinie. Sur une Terre limitée, c’est là une croyance délétère, et si nous n’agissons pas radicalement et rapidement pour changer les choses, nous mettons notre avenir en péril.

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