Numéro 3
Make our shit great again

La question des transports reste focalisée sur le transport des personnes. Pourtant, notre mode de vie suppose que soient transportées bien d’autres choses, à commencer par les marchandises que nous consommons, mais aussi les déchets que nous rejetons. Parmi ces derniers, il y a nos excréments qui méritent une attention particulière. Comment sont-ils traités aujourd’hui ? Que faire de ces restes organiques ? Finalement, est-il raisonnable de les considérer uniquement comme des déchets ? Telles sont les questions auxquelles nous tentons de répondre.
Cachez cette merde que je ne saurais voir !
Chaque individu produit environ 100 à 250 grammes de selles par jour[1]. À 7,5 milliards d’humains, cela donne un total d’environ 500 millions de tonnes par an. De quoi remplir au moins 11 108 piscines olympiques! Outre l’encombrement qu’ils représentent, ces déchets ne peuvent être abandonnés n’importe où ni n’importe comment, sous peine de menacer la santé humaine. Le contact avec nos excréments, via des eaux souillées par exemple, est vecteur de nombreuses maladies (choléra, diarrhée, dysenterie, hépatite A, typhoïde, poliomyélite…). En 2016, selon l’ONU, le manque d’assainissement était à l'origine de près de 280 000 décès par maladies diarrhéiques[2] dans le monde. Il faut donc se tenir à l’écart de ces déchets ou les traiter de manière à les rendre inoffensifs.
Dans les pays de l’OCDE, il existe principalement deux solutions : les fosses septiques et le ‘tout-à-l’égout’. Dans les deux cas, les excréments sont collectés dans des toilettes et évacués par des conduits à l’aide d’eau, potable généralement. Le premier système prévaut surtout dans le cas de résidences isolées, d’un terrain de camping ou de caravanage. Il consiste en une fosse souterraine où sont collectés les eaux usées, les eaux ménagères, et les eaux provenant des cabinets d’aisance. Au Québec, « Les boues […] doivent faire l’objet d’un traitement, d’une valorisation ou d’une élimination conforme à la Loi » [3]. Soit, elles sont traitées sur place (cabinet à terreau, installation à vidange périodique, installation biologique, cabinet à fosse sèche ou à terreau combiné à un puit d’évacuation). Soit, elles doivent être acheminées vers un système de traitement centralisé, de type tout-à-l’égout, comme c’est le cas généralement en milieu urbain. Cette seconde solution consiste à évacuer toutes les déjections directement vers des stations d’épuration, via le réseau des égouts et l’eau.
À Montréal, la station d’épuration des eaux usées de Jean-R. Marcotte fonctionne en quatre temps : les eaux usées sont acheminées par gravité jusqu’à la station. Il existe deux intercepteurs d’eaux usées, lesquels sont situés à 27 mètres et 43 mètres de profondeur respectivement, qui attirent les eaux usées par effet de gravitation. Les eaux usées sont ensuite pompées au niveau du sol pour être traitées. Les contenus de plus de 25 mm sont retirés (dégrillage), les matières abrasives et autres particules lourdes sont enlevées (dessablage) ; enfin, sont éliminées la majeure partie des particules en suspension et la quantité de phosphore qui s’y trouve est réduite (traitement physico-chimique). Par ce traitement, les particules s’agglomèrent en formant des flocons qui deviennent plus lourds et se déposent au fond des bassins en formant une boue. Les déchets, le sable et la pierre retirés de l’eau sont ensuite enfouis dans un site d'enfouissement. Les boues obtenues sont déshydratées et incinérées. La station récupère l’énergie pour le chauffage. L’eau, une fois épurée, retourne au fleuve Saint-Laurent.
Fosses septiques et tout à l’égout offrent une solution a priori efficace pour gérer à la fois le problème d’encombrement et les risques sanitaires que représente notre merde. Ces dispositifs permettent en outre à chacun d’entre nous de ne pas avoir à s’en occuper soi-même, sinon en pesant négligemment sur un levier ou un bouton de chasse d’eau. Enfin, ils rendent invisible ces déchets qui nous paraissent particulièrement dégoûtants. Bref, ils semblent cumuler tous les avantages et constituer ainsi une norme à atteindre partout dans le monde[4]. Mais est-ce bien raisonnable d’envisager l’universalisation de ce système d’élimination de nos excréments ?
Un système intenable
Du point de vue de la soutenabilité écologique, distinguons le gaspillage de ressources de la pollution. S’agissant du premier, les fosses septiques et les stations d’épuration ne sont pas des systèmes exemplaires. Gourmandes en eau potable, elles ne permettent pas par ailleurs de recycler les fèces, matière organique riche en nutriments, qui est un moyen de fertiliser la terre. Par exemple, chaque chasse d’eau consomme environ 6 litres d’eau potable[5] et ce sont ces mêmes eaux usées qui sont ensuite acheminées à l’un de ces deux systèmes. S’agissant du problème de la pollution, les selles se dégradent mal dans l’eau causant des problèmes d’eutrophisation[6]. L’ammoniaque, qui provient de l’urine, n’est pas éliminée par la station d’épuration de Montréal. Même s’il est inoffensif pour l’homme, il est extrêmement toxique pour les milieux aquatiques et continue à être déversé dans le fleuve Saint-Laurent, 365 jours par année[7]. Notre forte consommation de médicaments participe aussi à la pollution de l’eau. En 2009, au Québec, environ 561 ordonnances d’antimicrobiens oraux étaient exécutées pour chaque 1000 habitants[8]. Pourtant, le corps rejette une partie des molécules ingérées - entre 20 et 80% - par l'intermédiaire des excréments, qui passent par les réseaux d'eaux usées, alors que les stations d’épuration ne peuvent éliminer que jusqu’à 85% des micropolluants[9]. Cela s’applique également aux antibiotiques donnés aux animaux. Le déploiement universel de ces deux solutions et notamment la station d’épuration se révèle donc déraisonnable d’un point de vue écologique. Sachant qu’en 2016 32% de la population mondiale ne disposaient toujours pas de toilettes ou de latrines, ce problème pourrait s’aggraver. Il s’agirait donc ici de limiter l’usage des stations d’épuration à une petite partie de la population, et d’envisager un nouveau système qui satisfait à de nouveaux critères tels que la soutenabilité écologique.
Ce processus d’élimination des excréments humains pose par ailleurs des problèmes en termes de justice. Le gaspillage et les pollutions que nous venons d’évoquer sont injustes pour les générations futures et une partie des générations actuelles notamment les populations les plus démunies. En effet, comment défendre notre consommation d’eau potable dans les toilettes alors que tant d’humains n’ont pas accès à de l’eau de qualité et en dépit d’une pénurie d’eau?[10] C’est injuste également pour les autres êtres vivants. Par exemple, la pollution du Saint Laurent par les antibiotiques affecte injustement les animaux qui y vivent. D’un point de vue éthique, notre comportement apparait ici immoral. En effet, pourquoi faire souffrir inutilement un être sensible ? Aujourd’hui, nous savons grâce aux éthologues qu’il n’existe pas de différence de nature mais de degré entre l’homme et les animaux.
Par ailleurs, plus nous sommes riches dans nos sociétés, moins nous nous occupons nous-mêmes de notre merde. C’est généralement aux plus démunis que nous déléguons cette tâche. En France, même si le personnel d’entretien est un peu moins dissimulé qu’auparavant[11], il doit néanmoins travailler le plus souvent en dehors des horaires d’ouverture des toilettes publiques. Son horaire de travail se retrouve fractionné, ce qui occasionne entre autres toutes sortes de problèmes de santé et des difficultés à mener une vie de famille « normale ». Le profil sociologique de ces personnes à qui qui nous confions ce travail est bien connu. Il s’agit majoritairement de femmes, parfois âgées, dont une partie est née au Maghreb ou en Afrique subsaharienne[12].
Ajoutons qu’une part de nos excréments est constituée des restes d’aliments importés des pays les plus pauvres. Au mieux, ces excréments vont contribuer à la fertilisation des sols du Nord. Au pire, ils vont être traités puis enfouis. C’est une perte sèche pour les sols du Sud. Ces aliments contiennent également de l’eau, qui ne viendra plus irriguer les sols du Sud. En effet, nos excréments dévoilent un commerce international qui nuit à l’équilibre des écosystèmes sur la planète. « Le commerce international de la nourriture et des graines [...] transforme et redistribue la matière organique dans la biosphère » (librement traduit - Waltner-Toews, 2013, p. 27), ce qui bouleverse à la fois les écosystèmes des pays importateurs et ceux des pays exportateurs. Résultat des courses : « We are transforming a wonderful, complex planet into piles of shit » (Op. cit.). Plus précisément, le commerce des aliments transfère des nutriments, des excréments et des bactéries qui ne sont pas forcément adaptés au milieu où ils sont rejetés. Il entraîne parfois un épuisement des sols chez les pays exportateurs et engendre la détérioration des nutriments dans le sol chez les pays importateurs, là où les excréments sont rejetés. On a un problème ici d’injustice environnementale.
Du point de vue de l’autonomie, en Occident, quel contrôle avons-nous vraiment sur nos excréments ? Peu, puisque la plupart des habitations sont rattachées à un système d’égouts comme celui décrit plus haut. Ce processus d’élimination de nos excréments humains nous rend doublement dépendants, de la technique qui traite nos excréments, et des individus qui disposent du savoir-faire requis au contrôle de ladite technique. Le tout-à-l’égout traduit bien une gestion hyper technicisée qui soustrait les individus à toute alternative possible, à toute alternative qui considère les selles comme un intrant utile à d’autres activités de production (ex. jardinage, agriculture, production d’énergie). Dans les termes du philosophe Günther Anders[13], le tout-à-l’égout s’appuie sur une production hétéronome. C’est un dispositif complexe sur lequel nous n’avons pas le contrôle et qui nous déresponsabilise en ce qui concerne les conséquences de nos actes. Et si les individus souhaitaient conserver leurs fèces afin de les réutiliser, cela devrait-il être leur droit ? Les individus ne pourraient-ils pas redistribuer eux-mêmes leurs fèces en fonction des besoins de la société, c’est-à-dire accorder un droit d’usage (usus) et percevoir les fruits qui leur sont attachés (fructus), sans nécessairement octroyer un droit d’abus (abusus) qui permettrait au futur propriétaire d’en disposer librement. À ce titre, nous pourrions envisager la possibilité pour chacun de désigner librement un usufruitier parmi des agriculteurs ou des jardins publics lesquels seraient ensuite tenus de réutiliser les fèces sous forme de fertilisant.
Le prise en charge réservée à nos excréments s’avère donc boiteuse sur le plan écologique, injuste sur le plan environnemental, et aliénante sur le plan individuel. En dépit des efforts pour réduire leurs effets indésirables, peu d’efforts sont consacrés à leur recyclage voire à leur utilisation en de nouvelles ressources énergétiques non-polluantes pour l’homme et l’environnement.
Comment jouir de notre merde
En vérité, la merde est précieuse car elle est une source d’énergie à usage multiple que notre intelligence collective ne saurait ignorer plus longtemps. En outre, avec l’augmentation de la démographie mondiale, elle est de plus en plus abondante, de quoi lui concéder un avenir radieux. Voyons quelques-uns de ses usages possibles.
La nourriture animale et la transformation en énergie thermique représentent des issues possibles. La première est envisageable pour la culture de larves de mouches qui serviraient ensuite à nourrir des animaux comme la volaille, ou les porcs[14]. La transformation en nourriture animale exige toutefois un dispositif technique sophistiqué pour être déployé à l’échelle, ce qui demeure contraire à l’émancipation d’une technologie dominante. Quant à la merde comme combustible, il s’avère qu’en Inde et au Népal, les bouses de vache sont utilisées pour fournir l’énergie thermique à plus d’un million d’habitants. Elles sont séchées puis brulées car la bouse a la même propriété calorique que le bois[15]. Cet usage dépend toutefois d’une agriculture et d’un milieu géographique spécifiques, et le rendement énergétique est peu élevé.
L’engrais issu des boues humaines semble nous rebuter aujourd’hui. Pourtant, au XVII siècle, son utilisation était très courante dans les pays du monde entier[16]. Aujourd’hui encore, certains pays continuent de recourir à cette méthode naturelle: « Des chercheurs estiment que 90% de toutes les déjections humaines produites en Chine au fil de l’histoire ont ainsi été recyclées et ont fourni environ un tiers de tout l’engrais utilisé dans ce pays »[17]. L’urine s’avère un excellent engrais riche en nutriments qui peut être utilisé en agriculture sans risques pour la santé. Les matières fécales peuvent être facilement transformées en terreau par lombricompostage. Forts de nos nouvelles connaissances et des enjeux de notre siècle, avons-nous raison aujourd’hui de préférer aux engrais humains des engrais chimiques couteux, nocifs pour l’homme et la nature, et dont la production est gourmande en pétrole ?
Reste à savoir comment de manière pratique utiliser notre merde sans risquer de problèmes sanitaires. Là où les techniques à privilégier doivent être soutenables, justes et conviviales. Pour le philosophe Ivan Illich, un outil convivial est un outil qui n’est ni obligatoire, ni appropriable, qui ne suscite ni esclave, ni maître. Il élargit le rayon d’action personnel de tout à chacun (ex. cultiver, se chauffer), il est facile à utiliser, réparable et durable. Il doit aussi être fonction du contexte dans lequel on l’utilise. En l’occurrence, les solutions ne peuvent être les mêmes en milieu rural et en milieu urbain.
Dans cette optique, nous pourrions envisager que les personnes qui ont un jardin puissent également traiter elles-mêmes leurs déchets, ce qui est plus probable en milieu rural. Par exemple, en ayant recours aux toilettes sèches, cela évite les mauvaises odeurs et de gaspiller de l’eau pour les évacuer. Autre option, le bambou d’assainissement s’adresse à tous ceux disposant d’un jardin et vivent dans un climat tropical ou tempéré. Grâce à son système racinaire, le bambou possède des propriétés épuratrices. Cette solution ne permet pas le recyclage des excréments mais offre un mode de traitement naturel. Malheureusement, au Québec, cette option n’est pas envisageable en raison du climat.
En milieu urbain, on peut concevoir une cuvette reliée directement à l’unité de compostage, via un tuyau. Les déchets doivent alors être transportés au lieu de compostage, ce qui nécessite un sous-sol, à moins qu’un jardin citoyen ou bac à compost public soit mis à disposition. Des villes en Suède comme Tanum (12 000 habitants) imposent depuis 2002 l’installation de toilettes sèches ou à séparation urine-matière fécale dans les nouvelles habitations comme condition à l’obtention d’un permis de construire. Ceux qui ont des toilettes à séparation voient leurs urines collectées par des agriculteurs. La matière fécale est soit évacuée, soit compostée. L’accès à cet outil est encore interdit au Québec, car les autorités redoutent un risque sanitaire[18].
Notre merde a donc un grand avenir, à condition d’arrêter de s’en débarrasser comme d’un déchet nuisible et encombrant.
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[1] Feces. (s. d.). Dans Encyclopédie Britannica en ligne. Repéré à https://www.britannica.com/science/feces
[2] Organisation Mondial de la Santé (Novembre 2016). Assainissement, Aide-mémoire n° 391. Repéré à http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs392/fr/
[3] Légis Québec (Février 2019). Règlement sur l’évacuation et le traitement des eaux usées des résidences isolées, chapitre Q-2, r. 22. Repéré à http://legisquebec.gouv.qc.ca/fr/showdoc/cr/Q-2,%20r.%2022
[4] En 2016, environ 2,4 milliards de personnes ne disposaient pas de toilettes ou de latrines, soit environ 32% de la population mondiale et, parmi elle, 946 millions déféquaient à l’air libre[4], soit environ 13% de la population mondiale.
[5] CAA-Québec (2016). Consommation d'eau dans la maison - Maison Écol'Eau. Récupéré le 9 novembre 2016 à https://www.caaquebec.com/fr/a-la-maison/conseils/capsules-conseils/conseil/show/sujet/consommation-deau-dans-la-maison-maison-ecoleau/
[6] Les algues croissent plus rapidement grâce aux nutriments (ex : ammoniaque, phosphate) qui sont rejetés. Lorsque celles-ci meurent, les bactéries qui participent à leur décomposition utilisent l’oxygène de l’eau pour respirer. L’eau se retrouve donc appauvrie en oxygène ce qui menace la survie d’autres êtres vivants.
[7] Radio Canada. (2015). Montréal : le déversement d'eaux usées terminé, les rejets de polluants continuent. Récupéré le 10 décembre 2016 à http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/750825/ammoniaque-eaux-usees-montreal-polluants
[8] Agence de la santé publique du Canada (2009). Rapport sommaire sur l’utilisation des antimicrobiens chez les humains – 2000-2009. Repéré à http://www.phac-aspc.gc.ca/cipars-picra/2009/hausr-rsuah/vari-fra.php#t6
[9] D. Cot, Bruno. (2016). La pollution par les antibiotiques au fil de l’eau. Récupéré le 5 juillet 2017 à http://www.lexpress.fr/actualite/societe/environnement/la-pollution-par-les-antibiotiques-au-fil-de-l-eau_1837248.html
[10] En 2017, quelque 2,1 milliards de personnes, soit 30% de la population mondiale, n’ont toujours pas accès à l’eau potable à domicile. Organisation Mondiale de la Santé (12 juillet 2017). Récupéré le 18 mars 2019 à https://www.who.int/water_sanitation_health/fr/
[11] Prost, B. (2007). Dissimuler, montrer, oublier nettoyage et nettoyeurs: La propreté des espaces publics parisiens dans la seconde moitié du xxe siècle, entre visibilité et invisibilité. Hypothèses, 10(1), 67-75. URL : https://www.cairn.info/revue-hypotheses-2007-1-page-67.htm
[12] Lorriaux, A (2017, 19 décembre). La vie fractionnée des agents de propreté. Alternatives économiques. URL : https://www.alternatives-economiques.fr/vie-fractionnee-agents-de-proprete/00082220
[13] Anders, G. (2002). L’obsolescence de l’homme : Sur l'âme à l'époque de la deuxième révolution industrielle. Paris, France : Encyclopédie des Nuisances.
[14] Waltner-Toews, D. (2015). Merde... Ce que les excréments nous apprennent sur l'écologie, l'évolution et le développement durable. Paris, France : Piranha.
[15] (Ibid.)
[16] (Ibid.)
[17] (Ibid.)
[18] Porter, I. (2016). Le règlement sur les toilettes à compost déçoit les fabricants. Récupéré le 10 Décembre 2016 à http://www.ledevoir.com/environnement/actualites-sur-l-environnement/474450/le-reglement-sur-les-toilettes-a-compost-decoit-les-fabricants
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